On l’a dit sur toutes les tribunes et de bien des façons : CIBL est essentiel dans le paysage médiatique montréalais.
« Le journal que vous lisez, la station de radio que vous écoutez, les nouvelles télé que vous regardez et les influenceur.e.s que vous suivez portent toutes et tous, d’une certaine façon, la marque de CIBL.» peut-on lire dans la lettre ouverte publiée par les employés au lendemain de l’annonce.
Ces derniers font aujourd’hui les frais de décisions passées. Au-delà de la fatalité évoquée de la crise des médias et de la baisse des revenus publicitaires, des questions subsistent.
Car il y a aussi et surtout, la manière de faire : on annonce que les comptes sont à sec, on vire les employés «jusqu’à nouvel ordre» à la fin des vacances de Noël, en leur précisant qu’il faudra attendre quelques jours pour les rencontrer afin de leur expliquer plus en détails les raisons de leur mise à pied.
Voilà une manière de faire qui soulève l’indignation quand elle provient d’un employeur privé, crise médiatique ou pas. Où sont les acteurs de la gauche pour dénoncer ces mises à pied sauvages, au-delà du concert de voeux pieux pour la santé de la démocratie et la diversité médiatique? Seraient-elles plus acceptables parce qu’elles proviendraient d’un OBNL ?
Aux dires des employés, rien ne laissait présager cette annonce. Quelques dépenses avaient même été effectuées durant le congé des fêtes. Aucun mot d’ordre particulier quant à une quelconque restriction. Il y avait bien des signes de fragilité dans l’air, comme dans tous les médias à l’heure actuelle. Mais on avait l’impression que les finances avaient été assainies, la dette largement réduite.
Aucun présage, donc, d’une telle violence envers les salariés.
Pourquoi alors opter pour cette solution si radicale qui passe par la fin de la programmation au grand dam des auditeurs ? Qu’a fait le conseil d’administration de CIBL ces derniers mois ? A-t-il assumé l’entièreté de ses responsabilités quant à la surveillance étroite de la situation financière ?
Certains avancent que la faute repose en parti sur la Direction générale de l’organisme qui a justement démissionné en décembre. Ça ne change pas grand chose au final : il revenait au CA de surveiller et de donner les bons mandats. Dans ces circonstances, ce dernier a-t-il la légitimité de former un comité de relance alors que c’est sous sa gouvernance que la situation s’est ainsi détériorées ?
Voilà quelques questions que les membres devront se poser en Assemblée générale.
Un changement de modèle de gouvernance
Il ne s’agit pas simplement de distribuer les blâmes, mais de trouver la meilleure solution pour relancer la station. Car il ne faut pas s’illusionner quant à l’implication réelle des membres du CA qui agissent à titre de bénévoles sans nécessairement être impliqué dans le quotidien de l’organisation.
À ce titre, le dynamisme, l’implication et la résilience sans commune mesure dont ont fait preuve les employés cette semaine sont certainement des sources d’inspiration pour la suite des choses.
Au lendemain de l’annonce, aucun communiqué n’a été émis par le CA de CIBL. C’est à l’initiative des employés qu’une page a été créée, qu’un vaste appel à la mobilisation et au membership a été lancé. C’est leur représentant qu’on a entendu ces derniers jours partout dans les médias.
Les employés de CIBL ont su démontrer leur professionnalisme. Ce sont eux qui ont porté la station durant les crises successives. Ils connaissent les rouages de la radio. Ils sont l’âme de la station. Ce sont eux qui nous accueillent, qui connaissent tout un chacun. Ironiquement, ils sont un gage de stabilité de la station. Leur expertise est précieuse.
Pour sauver CIBL et remettre réellement la station sur les rails, la priorité doit d’abord passer par la sauvegarde des emplois. Un changement de modèle de gouvernance pourrait être une avenue possible, une coopérative de travail par exemple, où les employés pourraient prendre part aux décisions concernant les grandes orientations et celles exigeant de la souplesse au quotidien.
Le CA a mis à la porte les employés, l’inverse est peut-être la solution, que les employés «virent» le CA avec l’appui des membres afin d’avoir les coudées franches pour relancer la station.
Et ainsi sauver les emplois et participer à la santé de l’écosystème médiatique en innovant avec un nouveau modèle de gouvernance.