À Montréal aujourd’hui aura lieu la vingtième manifestation annuelle contre la brutalité policière. On peut se demander comment un groupe informel comme le Collectif opposé à la brutalité policière (COBP) peut survivre après vingt ans d’existence et continuer d’attirer des manifestants année après année dans les rues de Montréal malgré la forte répression qui les attend lors de ces rassemblements. Après tout, la CLASSE n’a-t-elle pas disparu avec la chute du gouvernement Charest? Les Indignados n’ont-ils pas abandonné leurs campements pour fonder le parti Podemos? Les protestataires du Printemps arabe n’ont-ils pas été soit dispersés par des régimes autoritaires ou remplacés par des djihadistes sanguinaires? Pour comprendre la résilience du COBP à Montréal, il faut se rappeler sa genèse et la longue tradition d’action communautaire autonome au Québec.
Le 19 avril 1995, une manifestation de soixante-cinq groupes communautaires rassemblant quelques milliers de personnes va du parvis de de la basilique Notre-Dame jusqu’au coin de Université et Notre-Dame, où se tient un congrès du groupe Human Life International (HLI). Suite à la manifestation, au moins une voiture de patrouille du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal (SPCUM) est vandalisée et plusieurs personnes sont arrêtées. Un comité de défense se constitue, qui devient le COBP et organise sa première marche, soit le 15 mars 1997. Au fil des ans, les relations se tendent de plus en plus entre les manifestants et les policiers et on voit une escalade réglementaire et policière pour tenter d’encadrer les manifestations.
Quel bilan peut-on en faire? Chaque mouvement social apporte son lot de manifestants blessés et autant d’occasions de raviver le mécontentement envers la police. On se rappellera notamment de la blessure de Francis Grenier lors du Printemps érable, peu de temps avant le 15 mars 2012. Avec l’aveuglement des élus municipaux et la complaisance des médias traditionnels, la manifestation contre la brutalité policière semble bien là pour rester.
Pour en savoir plus
sur le contexte social de 1995 : Demandes sociales et action collective : Que faire en temps de crise?, Pierre Hamel
sur le coût des opérations policières : Une courte manifestation, 300 000 $ en salaires, Karl Rettino-Parazelli, Sarah R. Champagne, Le Devoir
sur l’évolution des dépenses du SPVM pour l’agglomération de Montréal :
Tableau produit à partir des budgets présentés à la Commission de la sécurité publique
budget (en millions $) masse salariale (en millions $)
2008 562,2 493,5
2009 575,4 520,0
2010 586,4 520,1
2011 621,7 553,0
2012 648,7 591,9
2013 663,3 610,2
2014 677,4 621,1
Pour voir la couverture intégrale de la manifestation du 15 mars 2015 à Montréal :